"WE ARE SUCH STUFF AS DREAMS ARE MADE ON, AND OUR LITTLE LIFE IS ROUNDED WITH A SLEEP". La citation de Shakespeare qui inaugure mon blogue résume magistralement ma vision de l'existence humaine. Nous sommes faits de l'étoffe des songes, et notre courte vie se clôt par un long sommeil. Alors, plutôt que de rêver notre vie, vivons nos rêves! Et faisons éclater en infimes particules de sens jubilatoires le monde qui nous entoure.
jeudi 10 juillet 2014
L'homme du XXIème siècle est un homme qui marche, et qui est en marche.
Il va droit devant lui . Vers un but précis . Souvent au mépris des
autres , individualisme oblige . Alors, les rares moments qui s'offrent
à lui de se poser , et de chercher celui ou celle qui lui emboîtera le
pas pour un temps limité ou illimité, il les utilise à bon escient .
Avant tout, il a compris que le meilleur prélude à une entrée en matière communicationnelle est une exploration scopique de la personne visée. Certes , l'examen de son visage en dit long sur son intériorité . Il permet de faire un premier tri . Exit les mines renfrognées , les lèvres pincées , les airs hautains . Bienvenue aux yeux rieurs , rêveurs et aux sourires coquins .
Mais une fois commis le délit de faciès , il faut scruter les détails qui vont mettre notre prospecteur de la "perle rare" sur la voie des affinités électives . Et devinez quelle partie du corps le renseignera le mieux ? Le poignet ! On n'y pense jamais , mais c'est pourtant un indicateur infaillible quant aux goûts particuliers d'une inconnue lambda.
Tout comme le cou ou les doigts , le poignet a l'avantage, de par sa circularité , de se prêter à l'ornementation . De même que le collier embellit un cou, ou qu'une bague enjolive un doigt , le bracelet fait aussi partie, depuis des temps immémoriaux, de la grammaire de toute coquette , et ce faisant , livre à l' observateur averti quelques secrets sur les penchants de son heureuse propriétaire . Qu'il soit en métal précieux , en perles ou pierreries , en bois , en coton, en plastique, ou même, récemment, en élastique, cet ornement orbiculaire , par sa simplicité ou sa sophistication, révèle la fibre aristocratique tout autant que la fibre écologique ou synthétique de la femme qui le porte .
Attribut esthétique , certes , mais pas seulement . Le bracelet est devenu , au cours du siècle dernier , l'instrument indispensable à notre repérage dans le temps . L'invention du bracelet-montre , en 1904, par Louis Cartier , pour son ami aviateur Santos-Dumont, sonna le glas de la montre à gousset . Extraire une montre d'une poche à des milliers de pieds d'altitude relevait d'un exercice encore plus périlleux que la pratique de la haute voltige, cela va sans dire . Et même si on ne navigue pas dans les airs et que l'on a les pieds sur terre ( physiquement parlant , du moins) , rares sont ceux d'entre nous qui regrettent le port du gousset.
Avec l'avènement des nouvelles technologies , le bracelet s'est vu
confier une autre mission, plus inquiétante : celle de surveillance . On
connaît l'existence du bracelet électronique que certains repris de
justice , bénéficiant d'un aménagement de peine , doivent porter ( à la
cheville , pour plus de discrétion ) afin d'être à tout moment
géolocalisés par l'administration pénitentiaire . Au cas où ils
voudraient prendre la poudre d'escampette...
C'est dans la même optique de surveillance qu'a été inventé le " bracelet connecté" . Relié au smartphone de son propriétaire via une application, il enregistre le moindre de ses faits et gestes , mesure son temps de sommeil et contrôle même son alimentation. Si les objectifs fixés ne sont pas atteints , l'autoculpabilisation fait son apparition . Est-ce moins pire qu'une incarcération ? J'en doute . En prison , on n'a pas à disposition des verges pour se faire battre.
Quand je vous disais que le poignet d'une inconnue est plus bavard qu'il n'y paraît . Ce bref tour d'horizon de l'histoire du bracelet dans notre civilisation nous permet d'apporter une révision à notre postulat de départ . L'homme est en marche , certes . Mais il semble parfois marcher à reculons . Car quoi de plus régressif que de subvertir la fonction première d'un attribut féminin ! Loin de permettre à la femme d'exprimer librement sa féminité , le bracelet connecté, icône de la branchitude, l'enferme dans le carcan du rendement et de la performance , valeurs masculines par excellence . Le bracelet, autrefois artefact de séduction, devient menottes , et la femme , dans sa quête du corps parfait , retombe sous la coupe de l'homme. Ne nous étonnons donc plus si le mâle alpha la choisisse come appât...
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